La curation est un concept fraîchement
né (il devrait bientôt fêter ses deux ans) qui s’inscrit dans la mouvance du
Web sémantique et dans une logique d’interactivité et de partage propre au Web
2.0. C’est suite à la croissance exponentielle du volume d’informations dans
les années 2000 que l’on a cherché à trouver des remèdes contre cette
« infobésité » comme l’a appelé le bloggeur Brian Solis.
Cette
pratique consiste à sélectionner, éditorialiser et partager les contenus les
plus pertinents du Web pour leur donner une meilleure visibilité. Les
objectifs, ambitieux, sont coordonnés autour de trois axes : faire gagner
du temps aux utilisateurs dans leur recherche de contenus et d’informations (le
tri et la sélection ont été effectués en amont), donner du sens à l’information
choisie (contextualisation et organisation des données) et enfin rendre plus accessible le Web
invisible.
De fait, tout un écosystème s’est
crée pour satisfaire la demande. On dénombre aujourd’hui plusieurs dizaines
d’outils et de plates-formes de curation. Cette activité ne se destine
plus uniquement aux internautes, mais elle se concentre dorénavant sur l’aide
aux entreprises. Cependant l’offre s’attache à viser le public le plus large
possible : des entreprises de Knowledge Management (Knowledge Plaza ou ConnectedN), de grands
groupes souvent cotés en bourse (Factiva
leur permettant ainsi de comparer des données financières très pointues sur les
concurrents et l’actualité du secteur d’activité) ou des médias (Flocker).
Cependant la fonction première
d’aide à l’internaute n’est pas en reste puisque on trouve également des
produits qui sont spécialisés dans la collecte et le partage de liens comme Kweeper, Pearltrees ou alors
des outils qui permettent d’aider l’utilisateur à mettre en page ses contenus
sur le Web (Scoop.it).
Comme on a pu le constater ci-dessus, cette activité
« nouvelle » cumule beaucoup de points communs avec des métiers déjà
existants. En définitive qu’est ce qui distingue le curateur d'un veilleur,
d'un documentaliste ou d'un journaliste ? Quels sont les impacts de cette profession
sur ces corps de métiers ?
Lors de l’apparition de ce nouveau
concept les documentalistes, notamment, se sont élevés contre cet abus de langage
qui brouillait les cartes du secteur en créant un nouveau métier qui existait
déjà. En effet la définition du métier de documentaliste telle qu’elle est
donnée sur le site de l'ADBS (la
fonction du documentaliste est de mettre à la disposition des demandeurs
d'informations ou des utilisateurs potentiels les documents, extraits de
documents et/ou données conceptuelles ou factuelles satisfaisant leurs besoins
d'information) semble quasiment identique à celle du curator.
De plus la ressemblance touche aussi les
veilleurs et autres gestionnaires de connaissance en entreprise ainsi que les
journalistes. Quelles sont alors les différences fondamentales ?
La principale contradiction avec le
métier de veilleur est que la recherche du curateur est subjective et orientée
vers une communauté d’intérêts alors que le veilleur doit répondre à des
demandes et à des questions précises. En outre leur statut est différent puisque le curateur n’est
pas forcément institutionnalisé.
En ce qui concerne les journalistes, ce
qui les différencie des curateurs c’est qu’ils recherchent l’information sur le
terrain (enquêtes, interviews), ils créent leur propre contenu alors que les
curateurs le réutilisent, et ils ne vont chercher l’information que sur
Internet. En outre le journaliste doit respecter la ligne éditoriale de son employeur alors que le curateur est plus libre d’agir en fonction de ses
intérêts propres.
En définitive, le curateur semble être uniquement spécialiste d'un support, l’information immatérielle qu'il manie à sa guise sur Internet sans nécessairement faire concurrence aux autres métiers cités ci-dessus. En effet leurs statuts, leurs objectifs, leurs périmètres d'action, diffèrent. Néanmoins, il faut que les métiers de la documentation continuent de s’approprier ces nouveaux outils, ces nouvelles pratiques, pour devenir les prochains spécialistes du Web.
Sources
Pierre Tran, le guide de la curation, les concepts, 14/03/11
http://pro.01net.com/editorial/529624/le-guide-de-la-curation-%281%29-les-concepts/
Pierre Tran, le guide de la curation, les pratiques, 15/03/11
http://pro.01net.com/editorial/530072/le-guide-de-la-curation-%282%29-les-pratiques/
Pierre Tran, le guide de la curation, les outils, 16/03/11
http://pro.01net.com/editorial/529626/le-guide-de-la-curation-%283%29-les-outils/
Pierre Tran, Plates-formes de curation, le 29/10/12
http://socialcompare.com/fr/comparison/curation-platforms-amplify-knowledge-plaza-storify
Remise en question du concept :
Sophie Ménart, La Curation, la branlette intello du moment, le 02/03/11
http://www.sophiemenart.info/2011/03/curation/
Aurélie Duclos,exterminons le curator et réhabilitions le documentaliste,
le 17/02/11
http://www.tradonline.fr/blog/actualites/exterminons-le-curator-et-rehabilitons-le-documentaliste-1695
1 commentaire:
Ben justement, je vois pas trop la différence avec la veille... Peut-être parce que c'est le début de l'année ?
Je connais le curator en art, particulièrement contemporain ; y a-t-il un lien ?
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