IFLA WLIC 2014, session 41 Knowledge Management (G. Gast / Flickr) |
La gestion des connaissances - ou Knowledge Management (KM) - en bibliothèque est assez rarement évoquée par les revues professionnelles de l'hexagone. A l'étranger, elle suscite pourtant nombre de travaux depuis plusieurs décennies, en particulier des enquêtes. Si celles-ci se réduisent trop souvent à l'analyse de quelques dizaines de questionnaires, tel n'est pas le cas de l'étude sur la perception du KM dans les bibliothèques universitaires grecques, menée par Maria Koloniari et Kostas Fassoulis auprès de 318 agents, et publiée ce mois-ci dans le Journal of academic librarianship (1). Un des intérêts de cette enquête est qu'elle reprend des questions posées lors d'investigations antérieures par d'autres chercheurs, au premier rang desquels Maryam Sarrafzadeh, dont la thèse analysait en 2008 les réponses de 371 professionnels de l'information, bibliothécaires dans leur majorité et presque tous originaires des pays anglo-saxons (2).
Une vision positive du KM
Globalement, c'est un jugement très favorable qui semble ressortir des questionnaires.
Dans les deux enquêtes, une confortable majorité de répondants refusent de réduire le KM à un phénomène de mode. Ils sont encore plus nombreux à récuser la proposition selon laquelle les professionnels des sciences de l'information et des bibliothèques devraient ignorer la gestion des connaissances et se concentrer sur leurs compétences propres. A plus de 80 %, ils considèrent que le KM, loin de constituer une menace pour leur statut et leur avenir, est une invitation à acquérir de nouvelles compétences et peut offrir de nouvelles opportunités de carrière. Une écrasante majorité estime enfin que la gestion des connaissances augmente la valeur des services proposés par les bibliothèques, ainsi que leur utilité aux yeux des tutelles et des usagers.
Gestion des connaissances ou de l'information ?
Les choses se compliquent quand on aborde la question des différences entre la gestion de l'information et celle des connaissances.
Maria Koloniari et Kostas Passoulis, comme Maryam Sarrafzadeh avant eux, notent une certaine confusion entre les deux notions. Une majorité de bibliothécaires pensent en réalité qu'ils ont toujours fait du KM sans le savoir. Ils ont du mal à appréhender, par rapport à la gestion de l'information, les spécificités du Knowledge Management, telles que l'importance donnée au facteur humain, à la création et au partage des connaissances, que celles-ci soient explicites ou tacites. La majorité des répondants rejettent en outre l'aspect managérial du KM, préférant y voir un prolongement d'activités bibliothéconomiques mieux connues.
De la théorie à la pratique
Bibliothécaires anglo-saxons et grecs désignent les services de référence comme le domaine d'application du KM le plus prometteur. En cela, ils rejoignent les conclusions de plusieurs chercheurs en bibliothéconomie, qui soulignent l'impossibilité pour les professionnels de mémoriser l'intégralité des ressources susceptibles d'être mobilisées pour répondre aux usagers. Après le renseignement, c'est la prise de décision qui est repérée comme un champ d'application possible du Knowledge Management.
Reste que seulement 17 % des répondants grecs arrivent à citer un projet KM réellement mené en bibliothèque. Sont principalement évoqués des chantiers utilisant les TIC pour améliorer l'accès à des ressources internes ou externes (création d'archives institutionnelles, développement d'intranets ou de wikis, mise en place de services de référence virtuels...). Les bibliothécaires tendent à réduire le KM à la gestion de connaissances explicites par la technologie ; ils sont peu sensibles à l'implicite (les bases de connaissances informelles sont citées par 9 %, et les communautés de pratiques par 2,5 % seulement des répondants).
Les professionnels interrogés ont donc une perception positive du Knowledge Management et en maîtrisent déjà certains aspects fondamentaux, comme les TIC. Mais pour pouvoir initier de véritables projets KM en bibliothèque, la majorité d'entre eux devront au préalable clarifier et élargir leur compréhension du sujet, et acquérir de nouvelles compétences, notamment managériales.
SOURCES :
(1) KOLONIARI, Maria, FASSOULIS, Kostas. Knowledge Management perceptions in academic libraries. Journal of academic librarianship, 43-2 (2017), p. 135-142, ISSN 0099-1333
<http://dx.doi.org/10.1016/j.acalib.2016.11.006>
(2) SARRAFZADEH, Maryam. The implications of knowledge management for the library and information professions [en ligne]. Th. Doct. Phil., School of business information technology, RMIT University, 2008. 266 p. [consulté le 27 mars 2017]
<http://researchbank.rmit.edu.au/view/rmit:13384/Sarrafzadeh.pdf>
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