lundi 9 novembre 2015

La guerre de l'Open Access aura bien lieu...


Au lendemain des 6ème journées Open Access organisées par le consortium Couperin et deux ans après la précédente édition de ces Journées, où en est-on concrètement dans le processus d'Open Access ?


C'est la question que l'on peut se poser en comparant la teneur du discours fait par Mme Fioraso lors de la précédente édition avec les pratiques constatées.

Dans cette allocution [1], Mme Geneviève Fioraso, alors Ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, s'était exprimée sur la position de la France sur le sujet de l'Open Access. Elle rappelait les forts enjeux économiques et sociétaux que représentent la diffusion et la publication la plus large possible des résultats de la recherche - qui sont présentés comme étant par essence un bien commun.

Elle réaffirmait ainsi la volonté de la France de s'engager résolument dans la voie de l'Open Access, présentant les actions déjà menées (Persée, Hal, etc.) et les actions à venir : continuer à développer le Green Open Access (voie verte), qui consiste à déposer gratuitement un article dans un réservoir d'archives ouvertes, et s'attacher à promouvoir le Gold Open Access (voie dorée), principe qui fait payer l'auteur, ou son institution, et permet la gratuité au lecteur.

Or, tout ne semble pas aller de soi...

En effet, les chercheurs, pour faire avancer leur carrière, doivent absolument publier et autant que possible chez les grands éditeurs scientifiques reconnus - tels qu' Elsevier, ou Springer - qui sont une poignée seulement à se partager le marché de l'édition scientifique. Logiquement, ce phénomène d'absolue nécessité pour les chercheurs de publier dans leurs revues pour exister entretient le système...

Au-delà de la rédaction des articles dans lesquels ils présentent leurs travaux, les chercheurs siègent dans les comités éditoriaux de ces revues et corrigent aussi les articles (dans les revues à comité de lecture, ceux-ci doivent être validé par les pairs). Certains en viennent ainsi à se demander si les éditeurs ont encore une valeur ajoutée légitime, ce qui donne lieu à quelques coups d'éclats [3]. Ainsi au mois d'octobre dernier, toute l'équipe d'éditeurs et de rédacteurs de la revue Lingua ont annoncé démissionner de la revue, actuellement publiée par Elsevier, pour créer une nouvelle revue qui sera cette fois en Open Access.

L'arrivée des nouvelles technologies numériques vient encore complexifier la donne car elles permettent aujourd'hui aux acteurs scientifiques d'avoir potentiellement les moyens de diffuser eux-mêmes les résultats de leur travaux. Ainsi on voit aussi ponctuellement des chercheurs publier sur des plateformes pirates, sur lesquels des articles sous droit sont rendus disponibles gratuitement [3].

Pour les services de documentation scientifiques et universitaires, qui voient les prix de la documentation diffusée par ces quelques grands éditeurs historiques - dont leurs établissements de rattachement ne pourraient se passer - augmenter de façon exponentielle ces dernières années, ce phénomène a conduit au regroupement de grands centres de documentationau sein de consortium d'achat tel le consortium Couperin, organisateur de ces journées de l'Open Access [2], qui leur permettent d’espérer peser collectivement dans la balance des négociations.
Ainsi, on constate que si les déclarations d'intention sont là, les résultats ne semblent pas à la hauteur de ce qui était annoncé, ceci même lorsqu'ils pourraient l'être facilement. Ainsi Olivier Ertzscheid, enseignant-chercheur en Sciences de l'information et de la communication, dans son blog Affordance.info s'insurge (très) violemment contre les pratiques (ou plutôt contre les non-pratiques) d'Open Access des présidents d'université qui ont pourtant toute latitude et opportunités techniques (plateforme de stockage à disposition, et autorité pour imposer les mandats de dépôt) pour valoriser l'Open Access dans leurs établissements...

Le rideau n'est pas encore tombé sur la fin de la pièce de l'Open Access.
Les acteurs s'enflamment. La guerre de l'Open Access aura donc bien lieu !


Sources

[1] Site du Consortium Couperin, Programme des 6es journées de l'Open Access, du 12 au 14 octobre 2015,[Consulté le 09/11/2015].

[2] Site du Ministère de l'Enseignemet supérieur et de la Recherche, discours de Mme Geneviève Fioraso, le 24/012/2013, grand amphithéâtre du Cnam [Consulté le 09/11/2015].

[3] Oury, Antoine, Open Access : les scientifiques poursuivent le boycott contre Elsevier, Site ActuaLitté,  05.11.2015 [Consulté le 09/11/2015]. 
https://www.actualitte.com/article/monde-edition/open-access-les-scientifiques-poursuivent-le-boycott-contre-elsevier/61934





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