lundi 24 mars 2014

Musique : la promesse non tenue d'Internet

Internet va transformer et transforme déjà le système culturel de la musique, en donnant à tous la possibilité de partager l'oeuvre d'artistes peu connus, leur offrant ainsi une visibilité sans précédent.

On y a cru. Longtemps. Mais les chiffres récents de l'étude MIDIA démontrent le contraire. 1% des artistes les plus côtés sur le marché captent 77% de l'ensemble des revenus générés par la musique enregistrée. L'étude suggère que la cause d'un tel déséquilibre serait la "tyrannie du choix" induite par le service digital.

En effet, Internet n'a pas tenu sa promesse alléchante de diversité culturelle. Selon le concept de la "long tail", le Web aurait dû transformer le marché culturel et permettre l'augmentation des ventes d’œuvres plus confidentielles, qui, cumulées, seraient supérieures aux ventes d’œuvres dites "tubes". Au contraire aujourd'hui,  les "tubes" se sont appropriés l'espace d'Internet, on n'entend qu'eux, on ne voit qu'eux, on ne parle que d'eux... On n'achète qu'eux. 

Pourquoi cet échec ? La réponse est simple, selon Thierry Crouzet (cité en source plus bas). Le Net s'est centralisé. Avec le renforcement d'acteurs type Google, les petits sites perdent en visibilité, car seuls les grands producteurs peuvent s'offrir un pareil référencement. Résultat, les sites qui parlaient d'artistes non diffusés par les canaux habituels sont de moins en moins visités, au profit des grandes plateformes centralisées qui proposent des produits musicaux mainstream.

Pourquoi cette centralisation ? Les pouvoirs publics qui sanctionnent le partage de fichier (peer to peer) ont largement contribué à cette situation. Ils ont ainsi laissé le champ libre aux plateformes centralisées sous prétexte de vouloir protéger le droit d'auteur. De là à parler d'un résultat calculé et voulu, il n'y a qu'un pas, que nous ne franchirons pas, aujourd'hui.

Existe-t-il des solutions ? Il n'est jamais trop tard pour renverser la vapeur. On peut par exemple envisager de légaliser et d'encadrer le peer to peer, et certaines autorités publiques commencent à y réfléchir. Cela afin que le maximum d’œuvres bénéficie du maximum d'attention, et que cette attention ne se focalise pas toujours aux mêmes endroits.

De tels chiffres n'encouragent pas l'optimisme. Pourtant il faut savoir qu'il existe, dans ce qu'on aime à appeler les méandres d'Internet, de larges enclaves décentralisées (sites, forum...) qui, elles, favorisent ces échanges sur des œuvres dominées par les collections musicales régnantes. Ainsi, si vous voulez parler de votre groupe préféré et promouvoir son prochain concert, vous le pouvez. Pas sûr par contre que beaucoup de monde vous écoutera.


CROUZIER, T, Le Net rend plus con que la TV. Publié le 7 mars 2014. <http://blog.tcrouzet.com/2014/03/07/le-net-rend-plus-con-que-la-tv/> <en ligne> <consulté le 24/03/2014>

CALIMAQ. Le contrecoup le plus négatif de la guerre au partage et son véritable objectif. Publié le 8 mars 2014.<http://scinfolex.com/2014/03/08/le-contrecoup-le-plus-negatif-de-la-guerre-au-partage-et-son-veritable-objectif/>  <en ligne>  <consulté le 24/03/2014>

FRADIN, Andréa. Internet renforce le phénomène des popstars: 1% des artistes capte 77% des revenus. Publié le 6 mars 2014. Slate.fr. <http://www.slate.fr/culture/84277/internet-popstars-longue-traine-economie>  <en ligne>  <consulté le 24/03/2014>

DREDGE, Marc. How digital music services may be fuelling a ‘superstar artist economy’. Publié le 4 Mars 2014 dans Musically <http://musically.com/2014/03/04/how-digital-music-services-may-be-fuelling-a-superstar-artist-economy/?curator=MediaREDEF>  <en ligne>  <consulté le 24/03/2014>





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