Tout utilisateur d’internet, qu’il le veuille ou non, se constitue un patrimoine numérique composé de l’ensemble des données qu’il laisse sur divers supports et sur internet (comptes email, profils de réseaux sociaux, historiques des recherches, etc.). À notre mort, la conservation et la gestion de ce patrimoine peut susciter des problèmes. Mais, en France, le devenir de ce patrimoine numérique fait l’objet d’une législation qui permet aux proches ou héritiers, même en l’absence de directives de la part du défunt, de disposer, à leur guise, de ces données.
Si l’immortalité n’est pas
assurée pour autant, la mort physique n’épuise pas, en effet, la vie d’un
utilisateur d’internet car les données qu’il a laissées derrière lui restent
disponibles et forment ce qu’on appelle l’identité numérique qui perdure bien
après la mort réelle. Le patrimoine numérique, c’est-à-dire « l’ensemble
des données électroniques qu’un utilisateur laisse sur divers supports de
données et sur Internet en cas de décès »[1],
peut faire l’objet d’exploitation et de traitement assez particuliers, comme,
entre autres, assurer au défunt une « existence » outre-tombe. Sans traiter
de la question de l’immortalité numérique que nous nous promettons d’aborder dans
un prochain billet, on peut, toutefois, réfléchir sur le problème de l’héritage
numérique qui pose de sérieux problèmes juridique et éthique. En effet, le 8
septembre 2020, la cour fédérale de justice de Karlsruhe en Allemagne a décidé d’autoriser
les parents d’une jeune fille écrasée en 2012 par un métro à accéder à son
compte Facebook afin de déterminer s’il s’agit d’un accident ou d’un suicide. Le
compte était verrouillé par Facebook pour des raisons de confidentialité. En
2018, ils avaient déjà obtenu de la cour fédérale de justice le droit d’accès
aux données de leur fille contre Facebook qui arguait qu’un tel accès violait
la confidentialité des utilisateurs qui communiquaient avec la défunte. A la
suite de ce jugement favorable, Facebook leur avait remis une clé USB contenant
les données laissées par la jeune fille et présentées en un document pdf de 14 000
pages, difficilement exploitables. Insatisfaits, les parents poursuivirent leur
combat pour accéder non pas seulement aux données mais au compte lui-même. Ce
qui leur fut accordé le 8 septembre 2020. En France, le problème de l’héritage
numérique est réglé par l’article 63 de la loi pour une République numérique du 7 Octobre 2016 qui donne à chaque utilisateur la
possibilité d’organiser la gestion de ses données personnelles après sa mort :
« Toute
personne peut définir des directives relatives à la conservation, à
l’effacement et à la communication de ses données à caractère personnel après
son décès ».
Même en l’absence de ce qu’on
pourrait nommer un testament numérique, c’est-à-dire dans le cas où
l’utilisateur n’a pas laissé de consignes claires sur la gestion des données
qu’il laisse, la loi dite Lemaire autorise les héritiers à se substituer dans
l’exercice de ses droits au défunt, de telle sorte que même en l’absence de
directives sur la gestion des données, ces derniers peuvent décider de la
conservation ou non des données « sauf, précise ladite loi, lorsque la
personne concernée a exprimé une volonté contraire dans les directives ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire