jeudi 26 juin 2014

De l'e-tram à l'e-train ?

Voici 25 ans que le Congrès de l’IFLA ne s’est pas tenu en France. C’est dire l’importance de la rencontre qui se tiendra à Lyon, du 16 au 22 août : 3500 professionnels venus de 120 pays différents vont débattre du rôle des bibliothèques dans l’accès à l’information. L’événement est intitulé « Bibliothèques, citoyenneté, société : une confluence vers la connaissance ».

 Il ne s’agira pas seulement de communications entre professionnels, car les bibliothèques de Lyon sont sur le pied de guerre pour animer et donner toute son ampleur à l’événement auprès du grand-public. A cette occasion, l’IFLA met également en exergue les initiatives les plus novatrices. L’association a ainsi décerné son Prix International du Marketing à la ville de Brno, en Tchéquie. S’inspirant de l’ancienne initiative des bibliobus, la ville déploie un Tram numérique 2.0 qui offre une incomparable vitrine à la bibliothèque. Au lieu du traditionnel plan des lignes, vous trouvez, au-dessus des portes, des recommandations de lecture. La rame est émaillée de QR codes qui permettent de télécharger des livres électroniques. Cet e-tram est bien sûr géolocalisable sur votre téléphone portable…

Il y a quelques années déjà que des bibliothécaires français militants proposent des livres numériques, sous forme de tablettes ou de bornes de téléchargement. Pousser la logique de l'e-tram jusqu'au bout reviendrait à placer ces « pirates-box » aux abords des gares et des QRcode dans les trains. Mais une approche de type service public se heurterait là à d'autres initiatives plus lucratives : la SNCF a déjà passé, en 2013, un partenariat avec Youbox. L'offre proposée est assortie de publicités "non intrusives" dont l'abonné en Premium peut se passer moyennant finances. L'abonnement est mensuel et permet de lire en mode déconnecté.

Malheureusement ce dispositif ne concerne pas les gares isolées et ne résout en rien l’inaccessibilité de nombreux fonds municipaux d'île-de-France mis à disposition entre 9h30 et 18h00, lorsque les usagers potentiels sont déjà dans les transports ou sur leur lieu de travail...

FADBEN, "Le congrès mondial de l’IFLA mis sur orbite !",  6 mai 2014

Jost, Clémence, "Bibliothèque et marketing : un tramway sillonne la ville pour apporter des livres et des ebooks gratuits aux habitants", Archimag, 10/04/2014,

Texier, Bruno, "Ifla 2014 : les bibliothèques doivent jouer leur rôle dans l'accès à l'information", Archimag, 0/04/2014,

lundi 23 juin 2014

La neutralité du net : un principe fondateur remis en cause


Le principe

"La neutralité de l’Internet est le principe selon lequel les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) doivent proscrire toute forme de discrimination dans la façon dont ils gèrent les flux de données, qu’il s’agisse de discrimination à l’égard des internautes, des fournisseurs de contenus et des contenus eux-mêmes."[1]

Internet : c'est
à la fois des équipements et ce que l'on appelle une "architecture logique", c'est à dire les standards et protocoles assurant le transport des données. Outre sa dimension technique et d'accessibilité souhaitée universelle, Internet ne peut échapper aux lois économiques stimulant  l'innovation. Internet et économie sont liés. La logique fait que  le trafic sur internet va croissant et que les industriels souhaitent hiérarchiser les contenus. Une autre dimension dite allocative pose la donne en ces termes :
"Quel est le partage optimal de la valeur ajoutée permettant à la fois d'inciter les opérateurs de réseau à investir dans la capacité du réseau et d'inciter les acteurs du secteur des contenus à innover dans de nouveaux services et de nouvelles applications ?."[2]

Vers les flux de données payants ?

Le 15 mai dernier, Google faisait l’objet d’une plainte de la part de l’Open Internet Project (OIP). Ce groupe  réunit de nombreux  acteurs européens du numérique (400 acteurs dont Axel Springer, Lagardère Active ou CCM Benchmark…). L’OIP pointait du doigt le géant du web lui reprochant des faits anticoncurrentiels. Cela est clair, Google  "manipule les résultats de recherche afin de promouvoir ses propres services et dégrader ceux de ses concurrents". [3]

Aux Etats-Unis, le jour même, la Federal Communications Commission (FCC), l’agence américaine en charge de la régulation des organes de communication américains, approuve un internet à deux vitesses. Des flux payants ! « Les opérateurs pourront faire payer les sites Web pour maintenir une vitesse de connexion optimale. Ceux qui ne paieront pas devront se contenter d'un débit plus lent ».[4] Les Etats-Unis souhaitent légiférer rapidement. Les discussions sont en cours.
 
Bit Torrent Inc. un opposant actif

Des voix opposées se font entendre. Bit torrent Inc. a crée un faux site  internet pour simuler le Net à 2 vitesses. Un moyen d'informer et de rediriger les internautes vers le Congrès afin de rejeter ce scénario[5].

Les sites à gros trafic sont directement concernés. Plus d’une centaine de géants du Net ont répondu à l’appel : Facebook, Google, Ebay, Amazon, Twitter, Netflix … Ils se sont prononcés pour la neutralité du Net.

Qu’en est-il en France ?

Dans un entretien accordé au Point, mi-avril, Axelle Le Maire, Secrétaire d’État au Numérique, s’est dite « favorable à une neutralité qui est clairement affirmée et dont le principe s'applique aux réseaux comme aux grandes plateformes de services. Le Conseil national du numérique a proposé d'en inscrire le principe dans la loi et un chapitre sur le sujet du projet de règlement européen sur les télécoms est en cours de discussion au niveau européen. Je soutiendrai toutes les évolutions qui permettent de garantir un Internet ouvert et soulignent cette spécificité européenne."[6]


A en croire ses propos rapportés  récemment par l'AFP, il semblerait que là n'était pas un avis arrêté : " Que les opérateurs disposent d'un cadre réglementaire favorable à l'investissement et à leur compétitivité.".." Au prix de la neutralité du Net".[7]

La neutralité du Net pose la question d'internet et de son évolution ; Elle  apparaît comme un enjeu de société. Elle met au cœur du débat, l'innovation, ingrédient nécessaire à la bonne marche de la nouvelle économie. Le débat ne fait que commencer.

La FFC apportera ses conclusions en septembre prochain. Des conclusions attendues.


[1] [2] Les Cahiers de la DG Trésor – n° 2011-03 – Décembre 2011 – p. 2. La neutralité de l’Internet et ses enjeux économiques.
[3] [4] Le monde, Les Etats-Unis ouvrent la porte à un Internet à deux vitesses, consulté le 22 juin 2014,

[5] Site crée par Bit Torrent Inc, consulté le 22 juin 2014,

[6] Site de l'Arcep, Autorité des régulation des télécommunications, "Télecom - France", consulté le 24 juin 2014,

[7] Julien L, Numerama, mercredi 04 juin 2014, Axelle Lemaire recule-t-elle sur la neutralité du net ?, consulté le 23 mai 2014,

vendredi 16 mai 2014

Pérennité des supports opto-magnétiques, une promesse non tenue



J’ai mené récemment une mission de transfert de cassettes VHS vers un support opto-numérique pour le compte d’une association qui avait réalisé ces videos il y a une vingtaine d’années.

Le but était double : d’une part permettre aux adhérents de visualiser ces documents de façon simple et sans risque mécanique, d’autre part de pallier à une éventuelle dégradation due à la démagnétisation de la bande.
Certains étuis portaient la mention « garantie à vie ». Cependant, derrière ce slogan prometteur se cachait un véritable désastre. En effet, dans le lot traité, la plupart des images étaient oblitérées par une large bande de couleur sur le côté, les contrastes avaient disparu et parfois l’image semblait surexposée.

Les outrages du temps ne permirent pas de les restaurer, mais au moins, ce qu’il restait du film pouvait à nouveau être visualisé.

Le transfert fut effectué à l’aide d’un boîtier de conversion AV vers USB et du logiciel Pinnacle Studio. Pour le montage, l’encodage en Flash Video et la gravure des DVD, j’ai utilisé Adobe Première.
Le produit livré fut un DVD standard lisible sur un lecteur de salon et un fichier .flv gravé sur CD, copié également sur un serveur pour une accessibilité en salle de consultation.

Je me suis naturellement renseigné sur la pérennité du support opto-numérique. Les différentes sources que j’ai consultées font toutes état d’une extrême prudence quant à la garantie de conservation du support. En effet, les différents tests effectués sur des échantillons de disques archivés à la BNF ou à l’INA montrent, mesures à l’appui, que la durée de conservation de ces supports pourtant très prometteurs est extrêmement aléatoire.

Les recommandations pour minimiser le risque de perte de données est de dupliquer les supports opto-magnétiques tous le cinq ans et de les préserver de l’air et de la lumière.

Pour aller plus loin :

Longévité de l'information numérique / Hourcade Jean-Charles, Laloë Franck et Spitz Erich EDP Sciences, Collection : Académie des sciences, 04/2010, ISBN : 978-2-7598-0509-9, 108 pages

Préserver son patrimoine numérique : classer et archiver ses e-mails, photos, vidéos, documents administratifs: guide à l'usage des particuliers et des entrepreneurs individuels / Huc Claude ; préface de Banat-Berger Françoise
Paris : Eyrolles, ISBN 978-2-212-12789-8

Généralites, lecture synthétique :

Une étude très complète qui date un peu :

Une étude de 2013, mise à jour avec données techniques :
[Consulté le 15/05/2014]


Mots-clés : archivage numérique, disque opto-numérique, CD, DVD, VHS

dimanche 11 mai 2014

La nouvelle vie des cassettes



Le 4 mai dernier lors de l'International Magnetics Conférence qui s'est déroulée à Dresde en Allemagne, Sony à dévoilé une super cassette dotée d'une capacité de stockage de 185 téraoctets  Cette capacité représenterait 65 millions de chansons.
 Cette dernière pourrait être l'équivalent  en terme de contenu de la Bibliothèque du Congrès, la bibliothèque la plus importante  du monde.

Qu'est que cette avancée apporte en terme de stockage? 
Cette avancée n'est pas un retour en arrière malgré la forte régression des cassettes sur le marché car elle n'ont jamais vraiment disparu de la circulation.
La capacité d'une cassette  est multipliée grâce à la technologie de dépôt par pulvérisation qui permet de poser des cristaux magnétiques sur la bande et dont la taille est du  nanomètre.
Cette pratique fiable est toujours utilisée pour stocker des données , au fil des années la technologie par pulvérisation a permis le dépôt de de contenus plus conséquents.

Encore plus données pour répondre aux besoins ?
Les cassettes sont d'excellents moyens d'archivage car elle vivent plus longtemps que tout autre appareil (dvd, disque..).
En effet la durée de vie d'une cassette est de 40 ans, de plus elles coûtent peu.
Dans le domaine des archives ce format est privilégié car il a crût en 2013 de 26%, ce chiffre montre que le support cassette répond aux différents besoins des bibliothèques  qui ainsi récupèrent les éléments quand elles le désirent. 
La super  capacité  de la cassette lancée répondra aux attentes du marché qui s'accélèrent, puisque selon le rapport du Tape Storage Council l'extension du cloud et du big data secoue la cassette de sa torpeur.

Source
Audrey Fournier : Journaliste nouvelles technologie au journal LE MONDE


vendredi 11 avril 2014

La mort de Windows XP


Le fonds d'écran par défaut de Windows XP.
Fonds d'écran par défaut de Windows XP.Windows


 8 avril 2014, Microsoft cesse de prendre en charge son système d'exploitation Windows XP vieux de 12 ans, plus de mises à jours, ni de protections contre les cyberattaques.

Et pourtant:
Un quart environ des utilisateurs de PC sont resté fidèles à Windows XP et ont résisté aux sirènes vantant les mérites des systèmes d'exploitation plus récents commercialisés par Microsoft.
Les réactions sur la toile sont multiples, toutes soulignent les qualités remarquables de Windows XP qui ont séduit durablement tant de particuliers, d'entreprises et d'administrations.
Les efforts de communication de Microsoft visant à "ringardiser" les adeptes de Windows XP au travers de vidéos parodiques tombent à plat. C'est Microsoft elle-même qui fait figure d'accusé tant elle semble ne pas regarder en face ses échecs ou semi-échecs commerciaux : Windows Vista, Windows 7 et surtout Windows 8 beaucoup plus adapté aux smartphones et tablettes qu'aux PC.

L'obsolescence de Windows XP va inéluctablement s'accélérer dès lors que le système a été "lâché" par son concepteur. Pourtant, ses fonctionnalités avant ce coup de grâce, satisfaisaient encore les utilisateurs, la plupart des solutions logiciels usuels, même récents restant compatibles avec ce système d'exploitation.

Quelles solutions préconisent les experts ?
La plupart des commentateurs, tout en dénonçant le coup de force de Microsoft conseillent avec fatalisme de migrer au plus vite vers un autre système d'exploitation ....et, pourquoi pas, tant qu'à faire vers windows 7.
Certains experts tirent la sonnette d'alarme avec pléthore de détails effrayants et de recommandations strictes. Face à la menace d'une cyber-attaque massive préparée par des hackers ingénieux n'attendant que ce moment propice, il faut prendre des mesures immédiates, car le changement d'exploitation est certes indispensable mais exige un certain temps, le temps de tous les dangers.
Selon ces Cassandre, il est urgent de recenser et de verrouiller un maximum de PC équipés en Windows XP, disséminés dans les foyers et plus encore dans les entreprises et les administrations et il faut tout particulièrement se méfier des PC utilisés par les professionnels à leur domicile.
Un point noir essentiel concerne les systèmes XP "embarqués"dans les machines d'usage public tels que les distributeurs automatiques de billets ou les équipements de sécurité des bâtiments .

Face à ces commentaires fatalistes des propositions d'une tonalité différentes se font jour: pourquoi ne pas saisir cette mort de Windows XP comme une opportunité pour changer de paradigme, se tourner vers Linux et autres logiciels libres voire adoper une gestion bureautique via le Cloud en s'en remettant  à des entreprises de services adeptes de l'Open Source. L'usager se libererait ainsi  des logiciels propriétaires et de leur obsolescence.

Et si l'on évoquait un peu les réactions des usagers "lambda" face à la mort programmée de Windows XP :
les témoignages d'indignation sont nombreux devant le cynisme des firmes.On se met à genoux devant "le veau d'or" déclare l'un de ces internautes. Mais on note également la méfiance exprimée par d'autres face aux propositions alternatives fondées sur Linux et les solutions Open Source, l'avenir radieux d'un web libéré des stratégies commerciales des géants d'internet suscite encore le scepticisme car si les systèmes alternatifs assurent vraiment sécurité et efficacité pourquoi n'ont-ils pas réussi de percées plus significatives?
Les internautes apparaissent désemparés et ne plus trop savoir à quel saint se vouer et le feuilleton n'est pas terminé... l’arrêt de Windows 7 est programmé pour 2020!


«Windows XP est mort mais respire encore», Adrien  Sénécat, L'Express, L'Expansion High-Tech, publié le 07/04/2014, http://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/windows-xp-est-mort-mais-respire-encore_1505049.html, en ligne, consulté le 11/04/2014.

«Microsoft arrête ses mises à jours de sécurité pour Windows XP», Le Monde Technologies, publié le 08/04/2014, http://www.lemonde.fr/technologies/article/2014/04/08/microsoft-arrete-ses-mises-a-jour-de-securite-pour-windows-xp_4397341_651865.html, en ligne, consulté le 11/04/2014.

 «Windows XP est mort. Et aprés?», Framablog, publié le 03/04/2014,http://www.framablog.org/index.php/post/2014/04/03/windows-xp-est-mort-et-apres , en ligne, consulté le 11/04/2014.

Pour en savoir plus :
Infos-clés sur le cycle de vie de Windows


 «Fin du support Windows XP: à quoi s'exposent les entreprises», Toby Wolpe, ZDNet, publié le 08/04/2014, http://www.zdnet.fr/actualites/fin-du-support-windows-xp-a-quoi-s-exposent-les-entreprises-39798356.htm, en ligne, consulté le 11/04/2014.


Monoprix s'apprête à accepter le Bitcoin

L'information provient de Patrick Oualid, directeur e-commerce de la société, dans une interview publiée le 8 avril 2014 sur le site web d’informations économiques JDN (Journal du net) .


Crédit Reuters
Selon lui : "Monoprix a toujours été un pionnier et a cherché à apporter à ses clients ce que nous ne voyons pas nécessairement ailleurs".

Ce boucanier de la grande distribution souhaite positionner Monoprix comme le premier point de vente majeur en France capable d'accepter des paiements en devises numériques malgré le fait que le Bitcoin soit encore considéré comme une monnaie de "singe" en France. Assurément, le Bitcoin est encore regardé comme une devise de voyou dans nos contrées hexagonales.


Par ailleurs, l'idée est d’anticiper l’arrivée "imminente" du Bitcoin chez les grands détaillants français.
Patrick Oualid pense que "ne pas croire dans le potentiel du Bitcoin maintenant serait comme se moquer de l'importance des réseaux sociaux il y a quelques années."

C'est pourquoi, Monoprix pourra éventuellement accepter des paiements en Bitcoin sur son site e-commerce dès cette année. Le détaillant travaille également sur une application permettant à ses clients de payer en utilisant leurs téléphones mobiles dans les magasins.


L'objectif n'est pas uniquement d'attirer les Bitcoiners dans leurs magasins. C'est surtout la dimension innovante de cette monnaie virtuelle qui a séduit le directeur commercial. 

En effet, M. Oualid déclare que "si le Bitcoin ne nous apporte pas de plus de ventes, ce n'est pas grave".

En somme, le directeur e-commerce ne semble pas vraiment savoir à quoi ces Bitcoins pourraient bien servir au groupe (Casino) : "Pour l'instant je n'en sais rien. Ceci dit, les Bitcoins ont une valeur et s'échangent. On peut donc faire travailler de la trésorerie en Bitcoins de la même façon qu'en euros. Et demain, il y aura peut-être de nouvelles possibilités."


Alors, projet défricheur ou coup marketing? 









Sources: 

FAUCONNIER Flore: Interview de Patrick Oualid, "Pourquoi Monoprix veut se mettre aux bitcoins dès cette année ?" [en ligne] 8 avril 2014. [consulté le 11 avril 2014]
http://www.journaldunet.com/ebusiness/commerce/patrick-oualid-oualid-monoprix-bitcoin.shtml


KALLENBORN Gilbert: "Bientôt, Monoprix acceptera les bitcoins !" [en ligne] 8 avril 2014. [consulté le 11 avril 2014]
http://www.01net.com/editorial/617812/bientot-monoprix-acceptera-peut-etre-les-bitcoins/


SUSSAN Rémi :"Demain les entreprises autonomes (1/2) : au coeur de Bitcoin" [en ligne]. 27 février 2014. [consulté le 11 avril 2014]
http://www.internetactu.net/2014/02/27/demain-les-entreprises-autonomes-12-au-coeur-de-bitcoin/




jeudi 10 avril 2014

L'article 13 de la loi de programmation militaire



Une nouvelle loi, la « loi de programmation militaire » (LPM) vient alimenter les débats entre données personnelles et libertés individuelles d’un côté, surveillance et lutte contre le terrorisme de l’autre.
L’article 13 en particulier a beaucoup fait couler d’encre, rappelant le cas du NSA aux États-Unis. Le texte a été adopté le 21 octobre 2013 en première lecture par le Sénat, modifié par l’Assemblée nationale le 3 décembre 2013, enfin, le Sénat l’a adopté sans modification, en deuxième lecture le 10 décembre 2013.
Voici un court extrait du rapport de l’Assemblé nationale sur le projet de loi (n°1473), expliquant en quoi « la géolocalisation est devenue un moyen technique d’intérêt majeur pour la prévention des menaces terroristes » (1) :

Elle consiste à localiser un objet, téléphone ou ordinateur portable par exemple, en temps réel ou de manière différée. Elle peut être réalisée par satellite, mais également par GSM ou WIFI, ou encore par le biais de l’adresse IP. Elle permet, indépendamment de l’interception du contenu de la communication, de suivre les déplacements du téléphone, à intervalles réguliers ou en temps réel. La localisation d’un appareil est rendue possible par l’utilisation d’un logiciel qui traduit les coordonnées géographiques obtenues (longitude et latitude) sur une carte. (1)

Il s’ensuit, quelques temps après que le Sénat ait adopté le texte en première lecture, un débat passionné entre différents acteurs parfois accusés de mauvaise foi. C’est la question frontière entre lutte contre l’antiterrorisme, la prévention et le non-respect de la vie privée, très tenue, qui se joue ici.
Le 25 novembre 2013, l’article du Figaro « Téléphone, Internet : l'État pourra bientôt tout espionner », introduit par cette accroche : « la France vire-t-elle à la société orwellienne ? » (2), qui radicalisent les protestations. L’Etat est accusé, sous prétexte de vouloir prévenir les actions terroristes d’étendre sa surveillance, non plus seulement aux données techniques, mais aux contenus même des informations échangées. A noté, l’article est apparu avant que la loi ait été modifiée par l’Assemblée nationale.
S’il apparaît excessif, pour certains, voire « apocalyptique » (3) aux yeux du journaliste Philippe Vion-Dury du Rue 89, dans son article « Loi de programmation militaire : le scandale qui fait sploutch » (3), du 19 décembre 2013, la loi inquiète, pour ses dérives potentielles.

Jean-Jacques Urvoas (Président de la commission des lois de l'Assemblée nationale et député du Finistère) et Jean-Pierre Sueur (Président de la commission des lois du Sénat et sénateur du Loiret), dans un article du Monde du 08 janvier 2014 : « La loi de programmation militaire du gouvernement n'est pas liberticide » (4), répondent à cette polémique, qu’ils jugent injustifié :

Ainsi, depuis plus de quinze jours, des exégètes amateurs et de mauvaise foi s'associent-ils pour tenter de démontrer une prétendue démarche liberticide orchestrée par le gouvernement et soutenue par un Parlement complice afin de soumettre nos concitoyens à une surveillance généralisée à la mode américaine. Et depuis lors, nous nous efforçons d'opposer une analyse dépassionnée du droit à cette théorie du complot, au soupçon qui tient lieu de raisonnement. (4)

Ils relativisent grandement le danger de la loi, qui s’applique à une population très spécifique : les terroristes. En outre, les droits donnés aux services de renseignement sont strictement encadrés et n’affecte pas a priori les articles protégeant la vie privée des individus. Ils concluent leur intervention avec cette phrase :

Il s'agit au final de s'assurer que les administrations de l'Etat œuvrent à préserver la sécurité nationale et luttent pour maintenir la forme républicaine de nos institutions. Nous ne sacrifions pas les libertés individuelles à l'impératif de sécurité mais créons les conditions du plein exercice des premières face aux menaces pesant sur notre société (4).

Philippe Aigrain, informaticien, chercheur et ancien chef du secteur technique du logiciel à la Commission européenne (Wikipédia), considère, lui, que le débat autour de cette révèle un réel manque de connaissance, peut-être de compétences liées à ces questions de surveillances, des hommes politiques français. A propos de Jean-Pierre Sueur, il écrit sur son blog, dans un article du , « Surveillance généralisée ou sursaut démocratique ? » (5) :

Une journaliste de Public Sénat venue m’interviewer hier me disait que le président de la commission des lois du Sénat, Jean-Pierre Sueur, un homme respecté pour son action en matière de politique de la ville, s’étonnait des réactions à l’article 13 et aux amendements que le Sénat y a apporté, jugeant le tout « protecteur ». S’il le pense, c’est tragique de méconnaissance. (5)


                                                                                                                                                La loi a bel et bien été adoptée, même si beaucoup rêvent encore d’un amendement parlementaire a posteriori. Quoi qu’il en soit, il est probable que le débat ne s’arrête pas là et qu’il continuera tant que ces questions sur la protection des données privées ne sera pas réglée, si elle se règle.


(1) Rapport fait au nom de la commission de la défense nationale et des forces armées sur le projet de loi (n° 1473), adopté par le sénat, relatif à la programmation militaire pour les années 2014 a 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale, par les députées Patricia ADAM, Geneviève GOSSELIN-FLEURY.

(2) Jean-Marc Leclerc, « Téléphone, Internet: l'État pourra bientôt tout espionner », Le Figaro,

(3) Philippe Vion-Dury, « Loi de programmation militaire : le scandale qui fait sploutch », Rue 89,

(4) Jean-Jacques Urvoas, Jean-Pierre Sueur, « La loi de programmation militaire du gouvernement n'est pas liberticide », Le Monde.fr,

(5) Philippe Aigrain, « Surveillance généralisée ou sursaut démocratique ? », http://paigrain.debatpublic.net/?p=8461