En octobre 2019, l'Afnet avait initié un ambitieux projet : le programme Atlas destiné à fournir des standards numériques à l'industrie française. Il réunit de nombreux acteurs industriels pour la création de standards
de modélisation de type Product Life & Data Management (PLM/PDM), servant entre autres aux simulations et aux jumeaux numériques. De tels standards devraient rendre la production de modèles et
l'utilisation des technologies de simulation numérique plus
accessibles aux entreprises et démocratiser leur utilisation. Le premier workshop du programme, intitulé Simulation Numérique, a eu lieu le 19 mai dernier.
Atlas s'inscrivant dans le Programme Investissements d'Avenir, ces standards se voudront à la fois publics, internationaux et intersectoriels. Les modèles numériques sont aujourd'hui créés à partir de composants
issus de dizaines d'outils différents, assemblés au prix d'un effort
de mise à niveau des formats utilisés par les différents producteurs des
parties composant le modèle final. Deux acteurs participent à leur construction et facilitent les décisions lors du processus de production :
- L’architecte
système qui évolue dans un environnement "concepteur". Il définit les spécifications, les performances attendues et la constitution
des systèmes.
- L'architecte simulations numériques qui produit
des évaluations afin de déterminer le plus tôt possible que les
performances attendues soient atteintes et modifie les dessins en
conséquence, le cas échéant.
Leurs travaux sont rendus possibles par la collaboration d'un réseau d'opérateurs favorisant les
transferts et la mise à disposition de modèles inter-opérés pour former un modèle global utilisable et fidèle à son objet. Mais de tels réseaux restent encore très rares dans le paysage industriel français et nécessitent des conditions telles qu'une forte concentration de filière [1], ou des activités de recherche de pointe réunissant des laboratoires collaborant autour d'un même sujet [2]. Les réflexions de l'Afnet et ses partenaires portent sur l'acquisition de ces modèles à travers la disponibilité
des standards, et comment les relier entre eux, grâce à la définition de
méta-modèles.
Pour ce faire l'Afnet s'appuie sur 15 ans d'expérience dans la mise en place et la réflexion autour des standards dans les filières industrielles, comme le pré-projet Seine sous le patronage de la DGE entre 2006 et 2008, et sur les sujets design et manufacturing, supply chain, maintenance et cybersécurité, regroupés autours de projets multi-sectoriels tels BoostAero depuis 2005, ou la norme STEP AP242 depuis 2015. Ces réflexions ont été menées en collaboration entre des associations, des opérateurs et des institutions. Elles ont accompagné la création de plate-formes collaboratives de filières [3], et plus de 7000 entreprises de toutes catégories ont pu y participer.
Les filières participant à Atlas sont catégorisées selon deux types : en « objets » et chaine d'assemblage comme l'aéronautique, l'automobile, l’industrie électronique etc, ou en « projets » comme le bâtiment, la chimie des matériaux, le nucléaire, la métallurgie, ou les systèmes énergétiques. Elles sont représentées par des comités de pilotage stratégique composés de membres de l'Afnet, Industrie du Futur, le programme MINnD, l'AFIS, ainsi que des représentants d'organisations professionnelles tels que la FIEEC, Fer de France. Syntec, France Chimie, AIMCC, Galia, la GICAN, le Gifas, Building Smart France et PFA.
Le programme est structuré en groupes de travail, réunissant les
représentants des filières, en fonction des lots et des sujets qui ont
été définis durant la phase préparatoire du projet. Les stratégies et cas d'usage, le développement de standards, l'implémentation chez les éditeurs, la formation des démonstrateurs (POCs),
et la communication au public, forment les lots. Les domaines, qui doivent couvrir l'ensemble du cycle de vie du produit, sont les suivants :
- Ingénierie système et MBSE, piloté par l'AFIS
- PLM, end-to-end et Management des configurations, piloté par l'AFNET
- Logistique et global Supply-Chain, piloté par l'AFNET
- Maintenance piloté par l'AFNET
- Données et Infrastructures (traçabilité, blockchain, cybersecurité, IA) piloté par l'AFNET
- Le Smart Manufacturing piloté par l'Alliance Industrie du Futur
- Le BIM piloté par MINnD
- Cet ensemble
doit faciliter la généralisation des concepts de Jumeau numérique - piloté par l'AFNET et l'Alliance Industrie du Futur qui vont pouvoir
s'appuyer sur ces composants. Les homologues internationaux, NAFEMS et INCOSE assureront leur soutien pour la partie simulation numérique.
Une équipe de France sera constituée en
partenariat avec l'AFNOR pour que les travaux soient représentés sur la
scène internationale et afin d'augmenter la coordination et
l'efficacité entre les groupes de travail.
Le projet Atlas pourrait
ainsi rejoindre les réflexions de l'INCOSE et de la NAFEMS. Cette
dernière a déjà engagé une réflexion couvrant l'ensemble des besoins
des secteurs et des cycles de vie des modèles [4]. Deux pistes possibles
sont à l'étude :
- Le MCP, Model Caracterisation Pattern (disponible auprès de l'INCOSE), représentation générale couvrant des modèles 3D, CFD et multi-physique. Ce standard peu déterminé est spécifiable à partir de listes d'attributs spécifiques à attribuer selon le type de modèle. Il est très complexe, mais permet de disposer d'une couverture globale du cycle de vie dans une optique de réutilisation.
- Le MIC, Model Identity Card est un concept couvrant le début de cycle jusqu'à l'exploitation du modèle, visant à préparer les phases de construction de modèles complexes, dans la façon d'établir et peupler les architectures, produites par des entités différentes de l'intégrateur. Il permet de spécifier, contrôler les modèles, gérer leur assemblage et les capitaliser.
Concernant l'Archivage, une piste est à l'étude :
le projet LOTAR (LOng Term ARchival), basé sur le standard ISO STEP AP 209 destiné
au stockage des données de simulation. En terme d'application directe,
MoSSEC est une adaptation des MIC pour être compatible avec LOTAR. Il
semble que cette piste soit privilégiée pour le moment.
La validation du programme a eu lieu en octobre 2020. Ce projet, financé moitié par l’État, moitié par les filières industrielles pour un montant total de dix millions d'euros, amorce un cycle de trois ans. L'Afnet
recherche des participants pour une réflexion élargie et profitable à un
maximum de secteurs. Les plans de travail sont en cours et doivent être
élaborés avant 2022.